« L’espoir de posséder Napoléon-le-Grand dans nos contrées » mobilise la jeunesse d’Avignon. Comme les villes de Tarascon, le 3 mai 1808, Aix, le 24 et Arles, le préfet organise, le 10 mai 1808, la Garde d’honneur municipale d’Avignon. A travers cette formation, le préfet entend récompenser «le zèle et le dévouement de la jeunesse d’Avignon »1.
La garde d'honneur d'Avignon
La Garde d’honneur avignonaise est formée de 2 compagnies à pied de 50 hommes et d’une compagnie à cheval de 60 hommes, supervisée par deux conseil d’administration. A cela s’ajoute une musique de 18 hommes fournit par l’arrondissement de Carpentras. Chaque garde paye sa tenue et son équipement. Les armes, les drapeaux et l’uniforme de la musique est à la charge de la ville. Les gardes sont nommés soit par le maire, soit par le commandant. Les officiers sont pris dans ceux étant officiers dans l’armée.
L’uniforme, fixé par le colonel, est, pour les fantassins, un habit de drap blanc à poches en long, revers, collet, parements et passepoils amarantes. Boutons à l’aigle. Epaulette et contre-épaulettes en or. Veste et culotte blanches. Chapeau bicorne gansé d’or. Ils sont armés d’un fusil, d’un sabre, complétés d’une giberne avec un aigle doré. Les buffleteries sont en cuir ciré de blanc. Pour les cavaliers, l’uniforme est à la chasseur : habit vert, collet, revers et parements verts à passepoil amarante. Boutons demi rond or. Basques fermées par un bouton. Colback avec jugulaires, flamme rouge, plumet rouge. Gilet blanc à la hussarde. Hongroise vert galonnée. Bottes de hussards, bordées d’or. Eperons dorées. Aiguillettes or et laine. Ceinturon, giberne et banderole en maroquin amarante à l’aigle. Sabre an IV. L’harnachement est aussi à la hussarde. Dès le début juin, des patrons, des modèles et des gabarits sont mis au point afin de faire confectionner, avec succès, un uniforme le plus uniforme possible.
Le règlement prévoit toutefois que les chefs lieux d’arrondissement du Vaucluse forment des gardes d’honneur pouvant être amalgamés à celle d’Avignon, dans les escouades ou auxiliairement. Dès le 18 mai, cette mesure est officiellement étendue à tout le département. Si les arrondissements de Carpentras et d’Orange répondent favorablement à l’appel2, celui d’Apt ne bouge pas. Le 6 juin, le préfet relance le sous-préfet et cherche à piquer son orgueil : « je n’augure pas assez mal du patriotisme de votre arrondissement pour me persuader qu’il veuille se condamner à l’humiliation »3. Le préfet accuse ouvertement l’apathie et le manque de motivation des riches et cherche des solutions ; s’ils ne veulent pas participer à la Garde, au moins peuvent ils financer l’uniforme des volontaires pour la Garde d’honneur moins riches. Malgré cette relance, pas de nouvelles enthousiasmantes de l’arrondissement d’Apt : le sous-préfet n’en est qu’aux préliminaires de l’organisation. Cette lenteur entraîne un nouveau rappel de la préfecture dès le 10. Il cherche à encourager les volontaires par l’opportunité qu’ont les riches à montrer leur rang social et refuse l’idée d’en venir à la réquisition pour que l’arrondissement d’Apt soit représenté à ce « service d’honneur »4. Pour séduire les citoyens de l’arrondissement, il va même jusqu’à accepter un quota de la moitié de l’effectif de Carpentras.
La Garde d'honneur Vauclusienne
En réponse aux encouragements et à la volonté du préfet d’avoir une Garde d’honneur plus seulement Avignonaise mais Vauclusienne, et à l’empressement de certains arrondissements, le 5 juillet 1808, le préfet entérine et régularise l’organisation de la Garde d’honneur vauclusienne par l’arrêté d’organisation et le règlement de police et de discipline.
Elle se compose de 5 compagnies à pied et de 4 compagnies à cheval. L’instruction des hommes se fait par escouades dans leur lieu de résidence. La réunion des escouades composant la compagnie de l’arrondissement se fait à l’instigation du capitaine au chef lieu d’arrondissement. Là, les escouades sont amalgamées pour faire un service commun. A chaque chef lieu d’arrondissement correspond un conseil d’administration.
Le recrutement et l’uniforme sont identiques à la formation du 10 mai, exception faite des couleurs de pompons et des plumets, au choix des compagnies, qui différencient les arrondissements : pompons rouge pour les compagnies à pied et à cheval n°1 d’Avignon, vert pour les compagnies n°2 d’Avignon et blanc et orange pour les compagnies n°3 d’Orange. Au 8 juillet, les compagnies d’Apt, en retard pour son contingent, l’est aussi pour le choix de la couleur. Une tenue de fantassin est estimée à 200 francs.
Les difficultés rencontrées à Apt pour la formation de la compagnie à pied et à cheval ne s’arrête pas avec la transformation de la Garde d’honneur Avignonnaise en Garde d’honneur Vauclusienne. Malgré un rappel le 27 juillet, au 1er août, aucun nom ne figure sur les listes de l’arrondissement. Ce manque de mobilisation général des jeunes gens aisés de l’arrondissement scandalise le préfet qui met sur le compte de « l’apathie et l’inertie de votre jeunesse » le contrôle négatif des gardes aisés de l’arrondissement. Cette apathie se reporte aussi sur les volontaires moins riches qui ne peuvent pas financer leur tenue et leur équipement, puisque l’élan solidaire du riche vers le pauvre ne se fait pas. Il sera obligatoire en 1813.
Malgré tout, le 4 décembre, les compagnies à pied et à cheval, réunies à Avignon et précédées de la musique, reçoivent des mains du préfet leurs drapeaux et étendards.
Jérôme Croyet
docteur en histoire
1 Arrêté d’organisation de la Garde d’honneur à pied et à cheval d’Avignon, A.D. Vaucluse, R358.
2 L’arrondissement de Carpentras enregistre rapidement 50 à 60 fantassins et 18 musiciens parfaitement habillés.
3 A.D. Vaucluse R358.
4 A.D. Vaucluse R358.
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