· 

1800 : le 1er régiment de hussards cisalpins dans l'Ain

Un décret du 19 frimaire an VII organise les troupes de la République cisalpine en six légions d’infanterie, un régiment de hussards  et un régiment de dragons. Dès le 8 septembre 1799, ces formations constituent une légion italique.

Les hussards sont cependant exceptés de cette incorporation en raison des services rendus rendus durant la 2nde campagne d’Italie et, plus encore, par son dénuement en matière d’habillement, d’armement et de montures. D’abord envoyés à Auxerre, les 350 hussards du régiment rejoignent finalement le reste des troupes italiennes dans l’Ain [1]. Simultanément, le départ pour Genève du quartier-maître de la légion italique perturbe la distribution de la solde aux hussards italiens nouvellement arrivés.

La présence des Italiens – de jour en jour plus nombreux – ne fait qu’aggraver la situation économique déjà compliquée du département. Si la subsistance des réfugiés et des hommes de la légion italique devient critique, la nourriture des chevaux est également frappée de pénurie. En effet, le 19 floréal, alors qu’un nouveau contingent de la légion s’apprête à partir pour Genève, 400 hommes et 300 chevaux du 1er régiment de hussards cisalpins arrivent à Bourg pour y cantonner[2]. Probablement l’arrivée de ce corps impressionne-t-elle beaucoup la population civile locale. Si leur uniforme en impose bien plus que l’habit frac vert à revers jaunes des fantassins et des artilleurs cisalpins, leur comportement est à la mesure de la magnificence de leur tenue. Les hussards véhiculent en effet l’image de mauvais garçons caracolant à l’avant-garde des armées et maraudant sur les terres traversées. Dès le 20, la légende se mue en une réalité. Informés de l’arrivée des cavaliers légers, les hommes du magasin militaire de Bourg sont invités à leur fournir du fourrage. Arguant de sa mauvaise qualité, le chef de corps le refuse néanmoins.

Jusqu’alors en sourdine, la défiance entre soldats italiens et civils français resurgit à cette occasion. Les hussards dénoncent le comportement des employés français, ces derniers les qualifiant de « brigands » et de « scélérats ». Un cavalier essaie alors s’emparer de force d’une ration de fourrage. Un employé le gifle, ce qui met le feu aux poudres. Le hussard maltraité appelle ses camarades à la rescousse ; ceux-ci rouent de coups l’employé avant de le laisser pour mort. Tandis que le juge de paix fait promptement arrêter les coupables, le capitaine commandant les hussards adresse un rapport circonstancié au préfet Ozun. Le commissaire des guerres Quinet fait de même et prévient Ozun : « un tel corps est dangereux dans l’intérieur, ce n’est pas ici sa place »[3]. Aussi Quinet demande-t-il non seulement la punition des coupables, mais surtout le départ des hussards. Devant la gravité de l’affaire, Ozun ordonne au chef d’escadron Bellon de faire arrêter les fauteurs de trouble. De fait, 4 cavaliers sont écroués le 21. A l’annonce de l’arrestation de plusieurs de ses hommes, le capitaine commandant les hussards italiens demande à Bellon leur remise en liberté. Aussi, afin de calmer les esprits, ce dernier ordonne-t-il à Ozun la libération pure et simple des cavaliers emprisonnés.

L’état-major de la légion italique, commandée par l’adjudant-général Teulié, est logé au château de Challes. Il met promptement en place son propre service d’estafettes avec les administrations locales et ses nombreux détachements cantonnés en Bresse et Bugey. De Dijon, Vignolle informe le ministre de la Guerre qu’il a établi un service de correspondance « en plaçant à cet effet, de quatre lieues en quatre lieues, des postes sur les principales et les plus courtes routes de communication. Ces postes sont tenus pas trois hussards et un brigadier ou maréchal des logis ». Pour ce faire, il recourt aux « hussards cisalpins qui ne sont en ce moment en état de faire aucun autre service »[4].

Le passage à Auxerre – puis à Bourg – d’un régiment de hussards motive de jeunes Français épris d’aventure. Aussi, sur près de 574 cavaliers, 151 sont français. De même, l’encadrement de l’unité est français[5]. Telle situation prévaut d’ailleurs jusqu’au licenciement des hussards cisalpins, le 30 prairial an IX.

 

Jérôme Croyet

président de la SEHRI

 



[2] En effet, le commissaire des guerres Quinet avoue à Ozun ignorer qui a ordonné au 1er régiment de hussards cisalpins de tenir garnison à Bourg.

[3] Collection particulière, Lettre de Quinet à Ozun, 20 prairial an VIII.

[4] De Cugnac, Campagne de l’armée de réserve en 1800, Paris, 1900.

[5] Le régiment comprend un état-major et un escadron à 8 compagnies. Les frais d’entretien et la solde se montent à 6887 livres pour l’an VII et à 46226 livres l’année suivante.

Écrire commentaire

Commentaires: 0