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1794 : l'amalgame suite : résoudre la désorganisation

Les volontaires

A côté des troupes de ligne qui vont composer les demi-brigades de bataille, se trouvent les bataillons de volontaires issus des levées de 1791 et 1792, qu'il faut amalgamer entre eux et donc les profils sont différents.

Si les volontaires de 1791, les plus motivés, sont encadrés dofficiers qui ont majoritairement servis dans larmée, ils sont la projection de leurs communautés villageoises ou urbaines. Les hommes s'y retrouvent et calquent leur sociabilité, répétant des gestes de subordination appris dans la vie civile mais, parfois, au contact de la vie militaire et de l'éclosion de personnalités, en crées de nouvelles. D'une manière générale, leurs officiers, élus, sont soucieux de lordre et de la discipline de leurs hommes.

Les volontaires issus des levées de 1792 ne sont plus ceux de 1791. Si il reste des patriotes, trop jeunes pour partir en 1791, il commence à y avoir des désignés et des remplaçants qui partent pour le gain. Leurs motivations sont moins idéologiques et cela se ressent dans leur comportement, dautant quils partent souvent moins bien habillés et équipés. Avec la certitude de partir au front, les volontaires se font moins pressés. L'administration, en charge des recrutements, doit démarcher les volontaires par des discours patriotiques et la formation d'unités d'élites telles les grenadiers. A larmée ce seront ces bataillons de 1792 qui auront le plus de mal avec les culs blancs de larmée royale.

De fait, après la campagne d’été, ces bataillons de volontaires ont vu leurs rangs éclaircis, ayant perdu entre 20 et 40% de leurs effectifs. Pour l’état-major, il devient difficile de se servir avec efficacité de ces bataillons amoindris. C’est donc une crise des effectifs qui frappe l’armée en ce début de 1793 auquel s’ajoute une anarchie de la comptabilité des corps, qui inquiète le plus les représentants du peuple en mission. Le 23 août 1793, la levée en masse est décrétée mais pose un nouveau problème : les nouveaux volontaires doivent ils former de nouveaux bataillons avec de nouveaux cadres, élus, ou doivent ils combler les bataillons existants ? Si lidée est, comme en 1791, de former de nouveaux bataillons, le 22 novembre 1793 on saccorde pour incorporer les requis dans les bataillons existants, évitant ainsi la gabegie et le péril fédéraliste.

 

Résoudre la désorganisation

A partir de 1793, les troupes sont désorganisées, surtout les régiments de ligne qui forment encore le noyau de l’armée. Séparés en bataillons voir en compagnies sur l’ensemble du front, les régiments de ligne en ont perdu en cohésion et en efficacité. Sans compter les pertes dues aux combats mais aussi aux marches et contre-marches. Il faut donc combler les manques, incorporer de nouvelles recrues et pour se faire redonner de l’unité nécessaire à la solde et à l’usage tactique. L’unité idéale, née de la campagne de 1792 – 1793, est une unité à trois bataillons que certains généraux ont déjà anticipés en unissant volontaires et troupes de ligne.

Le projet de loi de Dubois-Crancé, qui lutte contre une opposition qui veut rester fidèle au dogme des régiments de ligne, prescrit l'embrigadement, pas encore l'amalgame : les bataillons devant être juxtaposés et non mêlés. Cet embrigadement, qui unit sous un même commandement des unités distinctes, permet d’unifier les cadres et de rationnaliser la chaine hiérarchique pour mieux encadrer mais rompt avec le dogmatisme, fleurtant avec l’irréalisme, des Jacobins, des Montagnards qui ont encore en février 1793 « une vision manichéenne de l'armée continuant d’opposer les blancs et les bleus. Si les sans-culottes soutiennent le principe d'égalité ils veulent aussi l'épuration des officiers nobles ou réputés d'aristocratie. De leur côté, les girondins ne veulent pas d’un projet qui rapproche la société civile de la société militaire »1. La réunion des troupes de ligne et des volontaires pose le problème des rapports du pouvoir civil et de l'armée ; de la prise de contrôle sur cet ensemble afin de la régénérer pour en faire un outil performant, car la primeur va à l’idéologie. En effet, Saint-Just préfère une armée de citoyens où l’on se bat par amour de la Liberté et pas pour rechercher la fortune ou une distinction individuelle. A la nécessité donc l’amalgamer les troupes, les distinctions et décorations individuelles sont supprimées sur l’autel du collectif qui se bat pour sauver la cause de la Nation tout entière.

 

Amalgame et demi-brigades de bataille

Sur proposition du Comité Militaire, la Convention crée les demi-brigades. Ces dernières comptent un bataillon d'un régiment de ligne et deux bataillons de volontaires. Sont ainsi créé 198 demi-brigades d'infanterie à partir des 111 Régiment d'Infanterie de Ligne.

Le décret 1011 de la Convention, du 10 juin 1793, autorise les généraux à effectuer l'amalgame des troupes de ligne et volontaires nationaux. Le décret 1466 de la Convention Nationale détermine le mode d'amalgame pour les régiments d'infanterie de la République : les compagnies doivent être composées de 40 volontaires et de 20 soldats de ligne. Après avoir souligné que le principe de la nationalisation de l'armée est retenue et que désormais troupes de ligne et volontaires auront le même uniforme, la même solde et le même type de promotion des cadres. De fait, lamalgame avantage la ligne et d'une manière plus générale tous les militaires ayant quelques années de service même si lélection au vote est instauré.

A suivre

 

Jérôme Croyet

docteur en histoire

 

 

1 BERTAUD (Jean-Paul) : « Notes sur le premier amalgame (février 1793-janvier 1794) » in Revue d’histoire moderne et contemporaine, tome 20 N°1, Janvier-mars 1973.

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