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2021 : des publications sur le 1er Empire

L’histoire de Napoléon, et du 1er Empire, est-elle trop insulaire ?

 

Dans un récent article du Monde, des universitaires déplorent le manque de production universitaire (du moins le manque de diffusion de ces travaux dans le monde napoléonien) dans un « champ saturé…« par les biographies de l’Empereur ou de ses proches, l’histoire événementielle, la publication de sources ».

Cette affirmation pose la question de la « dureté » et la fermeture supposée du milieu napoléonien qui empêcherait ce flot universitaire, légitime, de s’écouler.

 

Qu’en est il ?

Pour peut que l’on connaisse un peu le monde napoléonien et le milieu universitaire, comme je l’ai connu, on se rend vite compte que l’on a à faire à deux univers qui ne peuvent pas se comprendre.

En effet, contrairement à l’histoire de la Révolution Française, tombée entre les mains des instituts universitaires qui en ont caroublés l’étude en la soumettant à leur grille de lecture, l’histoire du 1er Empire, indistinctement de la personne de Napoléon, reste un champ ouvert aux grognards de l’histoire, les sans titres et les sans grades, qui, à force de recherche, peuvent produire un travail qu’un maréchal ne devrait renier. Cette grille ouverte n’est pas en adéquation avec la vision « élitiste » de l’université qui veut n’être que le seul organe habilité à traiter, loin d’un lectorat passionné qui trouve dans les revues et les magazines des moyens de découvrir et nourrir leur sujet d’intérêt ; car la passion à l’université corromprait la possibilité de pousser une réflexion objective.

De fait, comme le personnage, l’étude du 1er Empire reste populaire, peut-être même populiste aux yeux de certains ; car d’un statut de lecteur (et souvent de gros lecteurs), beaucoup de ces derniers par le biais du monde napoléonien, aspirent, à leur niveau, à devenir des écrivains (on retrouve le même type de démarche avec la Grande Guerre), ce qui n’est pas possible dans le milieu universitaire, notamment pour la Révolution Française, malgré les grandes tirades de début de cycle où l’on entend dans les amphis : « maintenant vous êtes des historiens ». Cet universalisme de la prise de plume, même modeste, entre en conflit avec la vision universitaire qui veut à tout prix se trouver des courants pour agiter la discipline quitte à tomber dans la déconstruction et parfois même le révisionisme ; « le 1er Empire est un mensonge » n’a-t-on entendu il y a quelques jours dans la bouche d’un écrivain de la lignée sur France 5.

 

Un champ d'étude populaire

Contrairement aux constats de l’article du Monde, le champ d’étude du 1er Empire et de Napoléon n’est pas si « insulaire » que l’université veut l’entendre dire : il est simplement plus ouvert et possible à tous, contrairement à l’étude de la Révolution qui tombe invariablement sous le couperet de la légitimité des titres et des grades, voir du copinage ; en effet, pour publier à l’heure actuelle dans le circuit universitaire tenant de l’histoire de la Révolution, les Annales Historiques de la Révolution Française, il faut invariablement citer des travaux récents de personnes du sérail et ne pas utiliser les travaux que l’on juge en adéquation avec sa problématique.

Malgré l’étonnant constat du Monde sur le manque d’ambition des publications non universitaires, beaucoup de champs d’étude ont déjà été ouverts hors le sérail universitaire : il suffit d’ouvrir l’index des articles traités dans la revue Napoléon 1er ou dans l’ancienne revue du Souvenir Napoléonien. Le forfait de ces publications est d’exister loin des centres de recherche financés par l’Etat et d’être publiées dans des revues associatives ou napoléoniennes grand public ; revues que le monde universitaire se refuse à prendre en compte du fait de leur état non universitaire et mercantile. De cela découle alors le regret que l’université n’irrigue pas, seule, cette période de l’histoire, comme elle l’a fait avec la Révolution quitte à la rendre imbuvable et inaccessible au lecteur lambda (il suffit de voir combien de pages sur le 1er Empire existent sur Facebook français par rapport au nombre de pages consacrées à la Révolution qui n’en compte qu’une seule).

Non, le monde napoléonien n’est pas fermé ni dur, il est simplement vivant, contrairement au monde révolutionnien qui est moribond. Il a simplement des codes qui reposent sur l’abnégation et le travail, le mérite, où le sachant ne s’impose pas à l’auditoire comme dans un amphi de 1ère année.

 

Blanc-Désisles

Feu étudiant en fac d’histoire

 

Rédacteur en chef du Père Duchesne 

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