1794 : la souveraineté populaire dans l'Ain

3.17 VERS LE POUVOIR DEMOCRATIQUE SOUVERAIN

 

La présence dans l’Ain et plus particulièrement à Bourg, de Javogues et d’Albitte, durant l’hiver 1793/94, permet aux sans-culottes d’appliquer leurs idées politiques jusqu'ici frustrées par Gouly. L'absence du représentant Albitte durant les mois de ventôse et de germinal an II permet aux Sans-culottes d’émettre l’idée de la prédominance et de l’expression de la souveraineté populaire, représentée par les sociétés de sans-culottes, en soumettant le désir d’épurer la Convention des hommes qu’ils jugent incapables de les représenter. Cette idée d ‘épurer la Convention et d’exercice direct de la souveraineté est plus à rapprocher de l’idéologie des sans-culottes de Paris que de ceux de Lyon au même moment, bien que Chalier en est fait l'allusion en mai 17931. Là encore, comme au moment de la crise fédéraliste, l’Ain bien que géographiquement proche de la capitale rhodanienne marque volontairement la différence avec cette dernière qui politiquement reste incertaine et culturellement différente, sauf pendant la répression de 1793.

L’idée que prône la sans-culotterie de l’Ain d’exercer un contrôle sur l’Assemblée, durant le printemps 1794, n’est pas une nouveauté. Dès le 26 septembre 1789, Marat, dans le n°16 de l'Ami du Peuple, lance la perspective de souveraineté populaire : "vous seuls avez le droit de nommer nos députés, de leur imposer des devoirs de leurs places, de révoquer leurs pouvoirs, de leur faire rendre compte de leur gestion, et de les récompenser ou punir suivant qu'ils se sont bien ou mal acquittés de leurs fonctions"2. A Belley l’idée est reprise, le 9 septembre 1793, lorsque la société populaire se prépare à un nouveau scrutin qui doit renouveler "toutes les autorités constituées de la République, excepté peut être la Convention"3. Toutefois la confiance dans les assemblées primaires est toujours de mise, malgré l’appréhension belleysanne, née en 1790, d’un coup des traîtres, des modérés et des aristocrates. Le débat sur l’exercice de la souveraineté populaire n’est toutefois pas encore lancé. Les premières idées sur le sujet le sont à la société populaire de Trévoux, le 23 brumaire an II, lorsque les sociétaires discutent de la possibilité qu’auraient les sociétés d’être consultées pour la nomination de nouveaux administrateurs : “ dans des temps révolutionnaires, tout retard, toute demi-mesure étaient un crime. . .on devait moins suivre les formes que les besoins des choses ”4. La société se prononce pour le cumul des mandats tant qu’un administrateur est “ intact, ferme dans ses principes et ardent pour la chose publique ”5. Avant l’arrivée de Gouly, les activistes des chefs-lieux du département sont déjà prêts au pouvoir.

 

 

d'après la thèse de doctorat d'histoire de Jérôme Croyet, "sous le bonnet rouge", obtenue en 2003 à l'Université Lumière Lyon II mention bien et félicitation du président du jury

mis en ligne par l’association SEHRI

 

 

1 METZGER (Albert) : Lyon en 1793. Tome 1. Libraire générale Henri Georg éditeur, Lyon, 1883.

2 BOUGEAUT (Alfred) : Les Cordeliers, page 175.

3 A.D. Ain bibliothèque D339.

4 VALENTIN SMITH : Bibliothéca Dombésis.

 

5 VALENTIN SMITH : Bibliothéca Dombésis.

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