1793 : la Révolution en actions dans l'Ain

LA REVOLUTION EN ACTIONS : PROBLEMATIQUES

 

 

Dès 1790, les patriotes sentent le besoin de propager leurs idées grâce à des événements marquants et des actions civiques. Si cela se traduit dans un premier temps par des fêtes révolutionnaires comme les fêtes de la Fédération à Lyon, Grenoble ou Besançon, puis la plantation d'arbres de la Liberté en 1792 dans presque toutes les communes de l'Ain. A compter de l'hiver 1793, la flambée festive anime les sans-culottes qui mettent en œuvre une politique systématique de communication à l’égard du peuple mais aussi et surtout des campagnes, où l’hermétisme dû à une différence de repères politiques est alors flagrant ; ce sont les fêtes décadaires. Suite à la chute des sans-culottes, le système des fêtes décadaires est réemployé par les messidoriens puis par le Directoire. Codées, symboliques, ces fêtes révolutionnaires sont des moments privilégiées de communication de masse.

L'effort d'instruction du peuple est pour les patriotes de l'Ain, la clef du succès de la Révolution sociale : "l'ignorance des peuples... a fait adopter (les prêtres) ; l'instruction et la vérité doivent les renverser "1. C'est dans ce but que les sociétés populaires installent des tribunes ouvertes permettant au peuple de s'instruire politiquement, qu'elles favorisent la création de sociétés de jeunes comme à Bâgé le Châtel le 7 nivôse an II et qu'elles se réunissent fraternellement. Les sans-culottes sont conscients, sans être des athés convaincus2, que la force du clergé est de détenir le savoir et de ne le divulguer qu’à un nombre restreint de personnes. Pour les révolutionnaires, l'ignorance dans laquelle demeure une grande partie de la population3 est la base du pouvoir des prêtres et des nobles. Baron-Chalier reconnaît “que l’hydre sera écrasée quand sera établie une instruction publique ”4, notamment auprès des femmes. Cet avis est partagé par certains patriotes des campagnes. Pour le Conseil Général de la commune de Polliat, “ l’instruction publique achèvera d’élever nos âmes et nous fera chérir la vérité et la Raison, la Vertu seront mises en pratique et le bonheur sera notre propriété ”5. Afin de remédier à cela, les sans-culottes de Bourg organisent des "missions civiques"6, durant l'automne 1793, pour "raviver le patriotisme et prendre des renseignements sur les ennemis de la chose publique"7. De telles missions ont lieu à Coligny, le 11 brumaire an II, à St Rambert et à Montluel où se trouve Blanc-Désisles, sur ordre du représentant Reverchon, pour “ y propager l’esprit public, de prendre différentes notes sur les membres de la municipalité, de donner avis au citoyen des gangrenés ”8.

Ces actions révolutionnaires, visant à instruire sont relayées dans les communes par les fêtes révolutionnaires et décadaires. La descente des cloches, la démolition des clochers et l’arasement des forteresses dans l’Ain sont des événements majeurs dans le cheminement idéologique des révolutionnaires de l'Ain, voulant marquer physiquement le département de la nouvelle empreinte politique de la France. De même l'instruction des foules passe par la mise à disposition des matériaux d'instruction que sont les livres et les objets d'art, au sein d'une bibliothèque et d'un muséum.

 

d'après la thèse de doctorat d'histoire de Jérôme Croyet, "sous le bonnet rouge", obtenue en 2003 à l'Université Lumière Lyon II mention bien et félicitation du président du jury

mis en ligne par l’association SEHRI

 

1Proclamation du 6 frimaire an II cité par LEDUC (Ph.) : Histoire de la Révolution dans l’Ain. Tome 4 page 132

2"La croyance d'un Dieu seul est prouvée par la nature entière. Un scélérat seul peut en douter". Principes Républicains. . . article 30. Société d’Emulation de l’Ain.

3 Sur l'ensemble du futur département de l'Ain, seul 25 % des époux et 11% des femmes savent écrire leur nom entre 1786 et 1790, tandis qu’à Bourg, 54% des hommes et 34% des femmes savent le signer entre 1785 et 1789. Dans les villes dombistes les taux d’alphabétisation est sensiblement plus élevé, 57% des époux et 39% des épouses de Thoissey, entre 1740 et 1789 savent signer, tandis qu’à Trévoux, un homme sur deux et deux femmes sur cinq savent lire.

4 Compte rendu de l’agent national du district de Belley du 22 nivôse an II, A.D. Ain ancien 1L98.

5 Requête du Conseil Général de Polliat au représentant Albitte. A.D. Ain série L non classée.

6 DUBOIS (Eugène) : Histoire de la Révolution. Tome 4 page 45.

7Registre du comité de surveillance révolutionnaire de Bourg, cité par DUBOIS (Eugène) : Histoire de la Révolution. Tome 4 page 51.

 

8 Séance du 11 jour du 2e mois de la République. Registre du comité Révolutionnaire de Bourg. A.D. Ain 14L 16.

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