1802 : la femme de Prévost dirige les affaires

Voici deux courriers écrite par une femme à un homme d’affaires à Rouen, au sujet d’un commerce de roulage avec son mari.

Contre toute attente, et des idées reçues, ces lettres montrent que les femmes ne sont pas absentes de la gestion commerciale d’entreprise familiale à la fin de la Révolution et sous le Consulat, mais bien présentes, prenant même des décisions et des initiatives ayant presque la main sur la comptabilité et la gestion financière.

 

« A mr Coville 25 rue Eloy à Rouen

De Gaillon [1], ce 17 germinal

Monsieur

Je vous réitère que notre chartier part de Gaillon, 22, pour arriver le même jour à Rouen.

Mon mari et moi, nous vous prions de nous rendre encore le service de nous informer s’il y aurait plus d’avantage de prendre de la charge pour la foire de Caen que pour Paris, car [nous] préfèrons toujours ce qui pourra nous être le plus bénéficieux.

De même, aussi, je vous informe combien l’on prend pour la commission et ce que cela peut nous rapporter de bénéfice pour la route qu’il prendra.

Nous vous prions aussi d’avoir la complaisance de voir le chartier à son arrivée et même de le surveiller jusqu’à son départ car vous savez qu’il a un petit défaut de boire et c’est dont je crains que nous en éprouvions quelques désagréments.

C’est pourquoi faites nous le plaisir de le surveiller en tout point.

Je vous redis encore que ça nous est indifférent qu’il charge pour Caen ou pour Paris, moyennant que le prix soit avantageux.

Je me presse de vous saluer de cœur.

Femme Prévost

Je prie votre chère épouse de trouver ici l’assurance de mon plus sincère attachement.

Mon mari vous présente ses civilités.

 

De Gaillon, 5 floréal an 10

Monsieur et ami,

Nous avons donc lu aujourd’hui, l’arrêt fatal que nous assure que le bien de Gaillon va être revendu [le] 28 courant. Il est affiché dès le matin.

C’est pour cette raison que nous vous prions que d’ici à cette époque, de tâcher de vous défaire de tout ce que vous avez en donnié à votre possession, du sais vous faire quelques sacrifices il nous faut du content pour le temps que je vous marque.

Nous aurions peut-être lieu d’avoir quelque espoir d’après les lettres que nous avons reçu de mr Savary, mais vous savez, mon cher, que ce qui est entre les mains des hommes est si incertain qu’il faut attendre le moment pour le flatter.

Nous espérons que d’ici cette époque, nous aurons l’avantage de vous voir et nous vous dirons de vive voix ce qui l’en est.

Le chartier a passé le 2 au soir avec sa voiture, bien conditionnée et c’est encore une obligation de plus que nous vous avons.

Mon mari vous dit mille choses honnêtes. La journée d’aujourd’hui rouvre encore sa plaie qui, je crois, ne guérira jamais.

Je prie madame Coville de trouver ici l’assurance de mon attachement comme à vous, monsieur.

Je vous salue

Femme Prévost »

 



[1] Il s’agit de Gaillon dans l’Eure. 

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