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1795 : les forges de Vaublanc dans la tourmente chouanne

 

         L'usine métallurgique du Vaublanc est édifiée en 1671 et 1672 par François de Farcy à la lisière de la forêt de Loudéac, source de combustible. En 1673, le site du Vaublanc se compose de la halle de la forge qui abrite un foyer animé par un soufflet en cuir et deux gros marteaux, de deux affineries, d'une fenderie et de quelques halles et magasins destinés à entreposer la fonte provenant de Querrien. Le 16 novembre 1675, Siméon Hay, comte de Couëllan, devient propriétaire des lieux. Cette année correspond à l'édification du logement patronal, remanié et agrandi en 1751. En raison de ressources hydrauliques insuffisantes sur le site de Querrien, un haut fourneau est édifié au 18e siècle au Vaublanc. C'est à cette époque que les forges du Vaublanc connaissent leur extension maximale. En 1767, le haut fourneau de la Hardouinais, à Saint-Launeuc, produit de la fonte pour l'usine et en sera une annexe jusqu'en 1836.

            Pendant la Révolution, pas moins de 400 à 500 ouvriers, sous la direction de François Delaizire[1], travaillèrent, pour le compte des Forges du Vaublanc, à fournir à l’Etat d’importantes commandes. Afin de maintenir les forges en service, son directeur, Delaizire, réquisitionne les chevaux et voitures dans les communes environnantes, ce qui poussent les requis à se plaindre au Directoire du District. Le 19 vendémiaire an III, l’agent national de Broons lui écrit car s’il « requiert les secours des chevaux et voitures pour le transport des matériaux propres à l’entretien de tes ateliers »[2], il s’avère que les « chevaux ordinairement attachés à ton service s’occupent…des transports étrangers, notamment celui des pommes » [3]. L’agent national qui le sensibilise au fait que les « cultivateurs…ont déjà…d’assez fréquentes réquisitions de charrois pour la République » [4], lui indique de faire « défenses [à tes ouvriers] de s’occuper à d’autres travaux qu’à ceux de tes ateliers, sans quoi nous sévirons contre eux le plus rigoureusement possible »[5] et à leur « dénoncer ceux qui se porteraient à tenir une conduite pareille…de les faires capturer et conduire devant nous par la force armée pour les faire punir suivant la rigueur des lois révolutionnaires »[6], d’autant plus que ces abus contribuent, pour le District, à « contrarier …la progression rapide des travaux propres à la destruction de nos ennemis »[7]. En effet, durant toute la durée de la Révolution, les directeurs manifestent de la sympathie à l’égard de la Révolution, dans une région très largement chouannée à partir de 1792 - 93. Ceci leur valut l’hostilité des rebelles, et au plus fort de l’agitation chouanne, le Vaublanc fut par deux fois au moins la cible des troupes insurgées. En 1795, Delaizire décède à l’âge de 53 ans après une vie bien remplie et agitée, pendant laquelle il avait réussi à inculquer au village sidérurgique, un certain mode de vie basé sur le patriotisme, le respect des lois et les valeurs de la République.

              La responsabilité de la forge est laissée à Louis Alexis Carré[8], son neveu, dont il devint le propriétaire en vertu de trois actes datés des 5 août 1808, 30 juin 1809 et 13 mars 1811 ; sous sa direction, plusieurs campagnes de construction voient le jour. En 1809, une première chapelle est édifiée sur le site ; en 1821, une cantine est construite pour les ouvriers.

 



[1] François Delaizire fut le régisseur du haut-fourneau de la Hardouinaye et des forges du Vaublanc jusqu’au 31 décembre 1794.

[2] Lettre du Directoire et de l’agent national de Broons au directeur des forges de Vaublanc, 19 vendémiaire an III. Coll. Part. Capichef  B9/5.

[3] Lettre du Directoire et de l’agent national de Broons au directeur des forges de Vaublanc, 19 vendémiaire an III. Coll. Part. Capichef  B9/5. En effet, les réquisitions sont pesantes sur une région en proie aux troubles contre-révolutionnaires, bien que les ouvriers en soient exempts. Toutefois, payés en assignats, ils éprouvent les pires difficultés pour acheter des grains.

[4] Lettre du Directoire et de l’agent national de Broons au directeur des forges de Vaublanc, 19 vendémiaire an III. Coll. Part. Capichef  B9/5.

[5] Lettre du Directoire et de l’agent national de Broons au directeur des forges de Vaublanc, 19 vendémiaire an III. Coll. Part. Capichef  B9/5.

[6] Lettre du Directoire et de l’agent national de Broons au directeur des forges de Vaublanc, 19 vendémiaire an III. Coll. Part. Capichef  B9/5.

[7] Lettre du Directoire et de l’agent national de Broons au directeur des forges de Vaublanc, 19 vendémiaire an III. Coll. Part. Capichef  B9/5.

[8] Son neveu Louis-Alexis Carré lui succède à la tête de l’entreprise à partir du 1er janvier 1795 aidé par son frère Pierre-Louis-Alexandre Carré.

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