« Roche Sauveur, le 24 messidor l’an III de la République française une et indivisible
La municipalité de la Roche Sauveur à celle du Croisic
Salut
Citoyens, frères et amis
Nos soupçons d’hier se confirment ; plusieurs voyageurs nous ont répétés que le débarquement qui s’effectua le 22 à la pointe de Pennerinse, n’était composé que de femmes, enfants et quelques autres individus ; on nous a dit que la colonne qui bivouaqua le 21 près le fort de Quedar, sur l’autre rive de notre rivière, eut ordre en se rendant à Vannes, de marcher sur Sarzeau ; que cette colonne forte de 1650 hommes fit rembarquer ces prostituées à la Nation Anglaise, et qu’hier soir elle vint se rafraîchir à Muzuillac d’où nous l’attendons ce jour, d’après tous les rapports nous donnaient sur sa marche : cependant rien de certain sur toutes ces conjectures.
Nous craignons que dans ce débarquement, il ne se soit trouvés des prêtres qui favorisés par les habitants des campagnes auront pu se soustraire à la vengeance publique : mais tout cela n’est encore que conjecture.
Le courrier de Vannes n’est pas encore arrivé ; il nous laisse dans l’impatience. La correspondance est bien mal suivie ; le département ne parait pas lui-même au courant des affaires, avant-hier il donna au district un détail des événements de Quiberon, qui n’était pas aussi circonstancié que celui que nous vous avons fait passer et qu’un hasard fortuit nous procura de prime abord puisque c’est le citoyen qui avait participé à tous ces événements, et aide-de-camp du général Canclaux, qui nous le dicta lui-même.
Nous serons toujours heureux de vous transmettre des nouvelles aussi officielles et nous espérons sous peu, pouvoir le faire avec assurance ; car nous ne négligerons nulle occasion, nous saisirons tous moyens, nous interrogerons tous les voyageurs pour être très instruits des événements et pour vous les transmettre.
Nous apprenons à l’instant par l’escorte du général Humbert qui commandait l’avant-garde de notre armée à Quiberon et qui arrive en ce moment, que Quiberon est toujours occupée par les émigrés qui sont vivement poursuivis par nos troupes qui les cernent dans le fort Penthièvre : que les anglais se rembarquèrent hier à midi près la pointe Saint-Jacques après avoir assassinés et fusillés cinq ou six patriotes, pris des bestiaux et des vivres et enlevés quelques vieillards, ils se sont repliés sur Quiberon.
La colonne qui arrive a fouillée toute la presqu’île de Sarzeau jusqu’à Penerf etr Surzur et est venue coucher à Mezuillac. Quelques citoyens de cette escorte nous ont assuré qu’une colonne de 1200 hommes d’émigrés et chouans, après le débarquement de Saint-Jacques, se sont jetés dans les terres, ont passé par Surzur à minuit et se sont portés sur le château de Tremouar en la commune de Berric, pays habité par les plus grands chouans du Morbihan.
La prochaine poste nous tacherons de vous donner des nouvelles de la prise de Quiberon et de la suite des chouans passés dans les terres.
Salut et fraternité
L.M.M. Moreau, notable
Joseph Herbet, maire
Crespel Latouche, procureur de la commune
PS : la colonne qui arrive parait destinée à garnir nos côtes, elle s’étendra de vos côtés ».
transcription Jérôme Croyet
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