épurations et persécutions entre Rhône et Saône

règlements de comptes et épurations administratives.

Au second retour des Bourbons, la traque des anciens officiers de l’armée impériale et des Bonapartistes est promptement lancée. Dans l’Ain, la nomination du préfet Dumartroy – actée le 3 juillet 1815 – favorise d’ailleurs cette dynamique. En effet, ce dernier conduit personnellement les opérations répressives. Si les membres des corps francs du département et les Bonapartistes ne sont guère persécutés par l’occupant autrichien, il n’en va pas de même lorsque ce dernier évacue le territoire. En effet, Dumartroy et les procureurs royaux font alors arrêter – sur dénonciation - Perréal et Bouvier (de Collonges), Jaquemier (de Gex) et le frère du colonel Béatrix, avocat à Nantua. Tous quatre sont arbitrairement condamnés à plusieurs mois d’emprisonnement. De même, Savarin – ancien volontaire de 1792 et capitaine de corps franc en 1815 – est jugé par un jury exceptionnel. Condamné à mort, il est exécuté à Bourg-en-Bresse. Retirés à Trévoux, les frères Bacheville – tous deux officiers de l’ex-Garde Impériale – sont contraints à la fuite. Quant aux fonctionnaires et administrateurs, ils sont frappés par un  mouvement d’épuration. Thomas Riboud – symbole de la Révolution « modérée » – est ainsi mis à pied, à l’instar de 160 maires et adjoints, remplacés entre le 27 juillet 1815 et le 8 février 1816.

 

l’affaire Grouchy.

Elle met en émoi l’administration préfectorale plusieurs mois durant. Le 30 septembre 1815, le ministre de la Police Générale demande au préfet de se renseigner sur les activités du maréchal Grouchy, présumé réfugié en Dombes. Le 21 novembre, le préfet de Saône-et-Loire prévient son collègue de l’Ain « que le général Grouchy est caché à Fareins, arrondissement de Trévoux, chez une dame Merlino. On ajoute qu’il y a été amené par M. de Fréminville, ancien sous-préfet de cet arrondissement »[1].

Conscient qu’une telle capture favoriserait grandement sa carrière, Dumartroy ordonne, le jour même, au capitaine de gendarmerie « de se transporter chez cette dame sur le compte de laquelle il vous a déjà été donné des renseignements qui la compromettent d’une manière grave, d’y cerner sa maison et d’y faire une perquisition exacte ». De fait, la maison de la dame Merlino est cernée par 3 brigades de gendarmerie et perquisitionnée. Si les gendarmes échouent à y capturer Grouchy, ils trouvent cependant un lit encore chaud, auprès duquel ils découvrent un pantalon, des bas et un serre-tête. Sommée de déclarer qui l’occupait, la veuve – nullement impressionnée – répond que c’était son fils, et qu’il s’est enfui à la vue les gendarmes. Suite à cette perquisition infructueuse, le préfet de l’Ain annonce au ministre de la Police qu’il désire interroger en personne la veuve Merlino, ce qui lui est accordé le 28 novembre. De nouveau interrogée, la veuve certifie que la personne hébergée chez elle n’était autre que son fils cadet, un officier récemment licencié. Ce dernier aurait craint d’être arrêté ; aussi avait-il préféré prendre la fuite.

Jérôme Croyet
président de la S.E.H.R.I.


[1]          Archives Départementales de l’Ain, 4M 95, Lettre du préfet de l’Ain, 21 novembre 1815.

 

 

 

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Commentaires: 1
  • #1

    Norbert Guillot (mardi, 24 mars 2020 11:34)

    A propos du "fils cadet" : Il s'agit de Victor Merlino (1791-1868) fils du conventionnel de l'Ain, Jean-Marie François Merlino (1737-1805). Tout juste sorti de St-Cyr, il avait rejoint (avec le 33è régiment d'infanterie légère) la Grande Armée alors en route pour Moscou. Il a été fait prisonnier au retour de Moscou à Smolensk. Il était alors depuis peu en France sans doute en 1814. Ce document constitue la première trace de sa présence en France après sa libération...