les faux Napoléon en Rhône-Alpes

Avez-vous entendu parler de ces imposteurs qui se faisaient passer pour l’empereur, étaient-ils nombreux dans la région ?

Jérôme Croyet : Oui, j'ai entendu parler plusieurs fois de ce genre  de supercherie notamment en Isère à Grenoble, ou dans l'Ain, en périphérie de Lyon.  Ces usurpateurs d'identité n'étaient pas nombreux, car se faire passer pour Napoléon n'est pas chose aisée, et il leur faut agir dans des endroits avec peu de population et ne pas s'éterniser. Toutefois, à la manière d'un colonel Chabert de Balzac, sont plus nombreux les escrocs qui se font passer auprès de familles de soldats pour le fils disparu miraculeusement réapparu. Ainsi, sous la Première Restauration, la justice de l'Ain est saisie par la famille Tabouret qui dénonce un usurpateur de l'identité de leur fils, alors soldat au 1er régiment d'infanterie légère. Ce dernier n'a pour mobile que l'appât du gain. Toutefois ces usurpations d'identité ne sont pas liées qu'à la Restauration, et sous l'Empire déjà, des escrocs habiles se font passer pour des soldats ou des officiers afin de profiter des largesses ou de la générosités de ceux qu'ils dupent, tel cet aigrefin habillé en officier du 5e chasseurs, qui se fait passer pour le neveu du ministre Dejean auprès d'officiers en garnison à Bourg, en 1810.

Quelles pouvaient être selon vous leurs motivations, étaient-ils « dérangés » mentalement, ou poussés par l’appât du gain ?

J.C. : Les faux napoléon ne sont généralement pas des illuminés, mais bien des voyous relevant du droit commun qui n'ont comme but que de vivre provisoirement aux dépens de ceux qu'ils bernent. Il n'y a pas de message politique, même si ils s'appuient sur la sympathie populaire pour exercer leurs méfaits.
Toutefois certains, peuvent se révéler plus ou moins dérangés, comme le faux Napoléon de Trévoux, en 1817, qui annonce l'invasion de la France par les Turcs.

 

Etaient-ils souvent démasqués, et comment faisaient-ils pour être crédibles auprès des populations ?
J.C. : Leur crédibilité jouent sur le mystère et le complot qui les entoure. En effet, pour justifier le fait qu'ils soient seuls ou dans le dénuement, ils le prouvent par le fait qu'ils sont rechercher et qu'ils ne peuvent pas paraître comme il se doit. Cette thèse du complot est d'autant plus plausible que le gouvernement royaliste dès l'automne 1815 durcit les mesures contre les bonapartistes et les républicains. A ceci s'ajoute la rapidité. Si ils veulent être efficaces, ils doivent ne pas rester trop longtemps dans le même endroit et bouger. Pour valider leur forfait, ils utilisent des faux noms, ne révélant leur prétendu légitimité d'être l'Empereur que sous le sceau du secret, ce qui renforce le mensonge ; ainsi un vrai-faux Napoléon qui sévit en Isère en 1815 se fait connaître sous le nom de Félix.
Toutefois, ils se trouvent mis à jour lorsque des incohérences s'établissent entre ce qu'ils disent ou font et ce que les gens savent ou connaissent pour peu que certains aient déjà vu ou cotoyés Napoléon de près. A ce ci s'ajoute la performance de la police qui fait circuler rapidement des avis de recherches ou des notes d'informations, car l'émoi généralement provoqués par cette situation a des retombée.

 

Est-ce qu’il y avait des régions plus « peuplées » que d’autres par ces personnes qui se prétendaient être l’Empereur ?

J.C. : Ces escrocs agissent là où un terrain propice à leur travail existe, à savoir des lieux où l'on peut croire à leur mensonge, comme la région lyonnaise ou le dauphiné. Ils évitent les régions hostiles comme le Midi ou l'Ouest. Certains agissent aussi à l'étranger, en Belgique.

 

Combien de temps aurait duré ces supercheries, jusqu’à la connaissance « officielle » de la mort de Napoléon 1er ou plus tard encore ?

 

J.C. : Tout comme les vrais-faux Louis XVII, les vrais faux Napoléon vont sévir après la mort de Napoléon en 1821. Si cette fois l'aspect escroc est peut être moins présent, c'est celui de l'image politique qui peut parfois prendre le relais, du moins en partie car l'appât du gain reste le moteur de cette usurpation d'identité.  

 

interview pour la presse locale 

 

découvrons Jean Baptiste Ravier, le faux Napoléon de l'Ain

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